26.11.2025 Cédric Balcon-Hermand 0 View 0 Comments

La matière noire enfin observée : une découverte révolutionnaire pour l’astrophysique

Mise à jour le 2025-11-26 17:04:00 : Des astrophysiciens japonais ont détecté un rayonnement gamma au centre de la Voie lactée, potentiellement lié à la matière noire.

Ce qu’il faut savoir

Le fait : Un halo gamma a été détecté, correspondant à la densité théorique de la matière noire.
Qui est concerné : Les astrophysiciens et le grand public intéressé par l’astrophysique.
Quand : Les résultats ont été publiés le 25 novembre 2025.
Où : Au centre de la Voie lactée.

Contexte

À la simple évocation de ces deux mots « matière noire », l’esprit des plus grands astrophysiciens se heurte à la plus grande absente de la physique moderne. Complètement invisible à nos télescopes, on ne peut que la repérer grâce aux déformations de l’espace-temps qu’elle provoque. Nous pourrions pourtant dire qu’elle est la charpente de notre Univers, représentant 85 % de la matière qu’il contient.

C’est pourquoi le halo gamma détecté par Fermi autour du centre galactique fait autant de bruit : un surplus de photons d’une densité énergétique exceptionnelle. Rendu public ce 25 novembre dans la revue Journal of Cosmology and Astroparticle Physics, par une équipe de chercheurs japonais, il apparaît exactement là où la densité de matière noire théorique atteint son maximum.

Un signal lumineux qui défie toutes nos explications

La lueur captée par le télescope Fermi n’est pas une lumière au sens strict du terme : il s’agit de photons gamma, des particules de lumière mille milliards de fois plus énergétiques que celles du spectre visible. Certaines théories suggèrent que la rencontre entre deux particules de matière noire peut conduire à leur disparition en libérant un éclair de photons gamma, une signature énergétique correspondant à ce que Fermi a détecté.

Ce flux gamma équivaut à 20 milliards d’électronvolts (20GeV), soit 10 000 fois plus que ceux produits lors des désintégrations radioactives naturelles sur Terre. Cette source est soit très intense, soit extrêmement rare, et incompatible avec les phénomènes astrophysiques habituels.

Il avait la forme d’un halo, une auréole diffuse entourant la Voie lactée. Les astrophysiciens savent que c’est le portrait-robot théorique de la matière noire : une gigantesque bulle, centrée sur le noyau galactique. Les trous noirs, les étoiles à neutrons ou les supernovas ne peuvent produire une telle émission gamma.

Pour les chercheurs, et notamment Tomonori Totani, l’auteur principal de l’étude, cette similitude entre la répartition des photons gamma et la carte de densité théorique de la matière ne peut être qu’une structure gravitationnelle que seule la matière noire est censée former.

Détection Matière Noire — Carte Fermi du rayonnement gamma : les zones rouges et jaunes marquent l’excès énergétique étudié par Totani et son équipe. © Tomonori Totani / The University of Tokyo

Les WIMPs : une théorie vieille de 50 ans refait surface

Depuis les années 1970, l’une des hypothèses les plus solides pour expliquer l’existence de la matière noire est la théorie des WIMPs (Weakly interacting massive particles). Des particules hypothétiques des milliers de fois plus lourdes qu’un électron et capables de traverser la matière ordinaire comme si elle n’existait pas.

L’analyse de Totani et son équipe est complètement compatible avec ce cadre théorique, car nos modèles prévoient que lorsque deux WIMPs se rencontrent, elles peuvent s’annihiler : leur masse disparaît pour être convertie en un petit nombre de particules beaucoup plus énergétiques, dont des photons gamma.

Le sursaut gamma capté par Fermi présente justement l’énergie caractéristique que ce type d’annihilation devrait libérer : un photon d’environ 20 GeV, pouvant résulter de la disparition complète de la masse de deux WIMPs.

« Si cela se confirme, ce serait la première fois que l’humanité voit directement la matière noire. Et cela indiquerait qu’il s’agit d’une particule nouvelle, absente du modèle standard », explique Totani. Cependant, il garde une certaine réserve car les données de Fermi ne permettent pas encore d’exclure totalement des sources alternatives.

Par conséquent, d’autres jeux de données devront être croisées afin de confirmer l’hypothèse de l’équipe. « Si ce signal apparaît de façon plus nette à mesure que Fermi accumule de nouvelles données, cela renforcerait très clairement l’idée qu’il provient de la matière noire », estime Totani.