Vaccins ARNm : Sanofi veut rattraper son retard avec son nouveau centre R&D

Lors de la pandémie de Covid-19, qui a mis en lumière les vaccins à base d’ARN messager (ARNm), Sanofi avait échoué à développer son propre sérum. Après l’annonce, en août 2021, du rachat de l’américain Translate Bio pour près de 3 milliards de dollars, le groupe pharmaceutique avait finalement annoncé l’abandon, quelques mois plus tard, de son projet de vaccin à ARNm. Ce revers lui avait valu une salve de critiques, que le groupe lui-même qualifiait de « Sanofi bashing ». Aujourd’hui, il entend tourner la page avec XL, sa nouvelle plateforme de R&D Vaccins qui intègre pleinement l’ARNm.

Le projet aura pourtant mis du temps à se concrétiser. Annoncé en juin 2020, le nouveau centre de R&D dédié aux vaccins du groupe basé à Marcy l’Etoile (nord ouest de Lyon) et complété, un an plus tard, par un centre d’excellence pour les vaccins à base d’ARN messager (ARNm), a été inauguré ce 18 avril.

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La plateforme XL, qui s’étend sur 14.000 mètres carrés répartis sur plusieurs étages, pour un investissement de 120 millions d’euros, est ainsi présentée comme la vitrine du virage opéré par Sanofi vers l’innovation et l’immunologie. Elle devra aussi être l’épicentre du développement des vaccins à ARNm, assure Charles Wolf, directeur France du groupe. Reste que sur ce terrain, les géants Pfizer, Moderna, BioNtech se sont déjà positionnés depuis longtemps.

Mais Sanofi entend déployer une « double stratégie » : développer des produits pour des pathologies encore non adressées, ou de meilleurs produits que la concurrence, affirme Jean-François Toussaint, responsable monde de la recherche et développement vaccins.

1 milliard d’euros et une dizaine de candidats en phase clinique

Pour mener à bien cette mission, Sanofi s’appuiera sur près de 300 scientifiques, soit la moitié des effectifs dédiés à la R&D sur les vaccins du groupe, l’autre moitié étant implantée aux États-Unis. Ce qui s’est traduit, en France, par le recrutement de 150 nouveaux collaborateurs et la formation, en interne, d’une centaine de personnes.

Ces équipes, qui ont toutes pris leur quartier dans ce nouveau bâtiment flambant neuf au cœur d’un parc de 90 hectares et 80 bâtiments, sont à l’œuvre depuis plusieurs années. Et bénéficient d’une partie du budget du groupe sur la vaccinologie, annoncé à près d’1 milliard d’euros pour 2024 par Charles Wolf, qui souligne une multiplication par quatre du montant en quatre ans.

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Plusieurs candidats vaccins à base d’ARNm (vaccins en cours d’élaboration) ont déjà vu le jour, dont une dizaine sont aujourd’hui en essai clinique de phase 1 et 2. Une poignée d’entre eux devrait bientôt arriver en phase 3, si les tests sont concluants, c’est-à-dire, la phase de préenregistrement, détaille Jean-François Toussaint.

Parmi les problématiques traitées, on trouve d’ores et déjà des vaccins contre le VRS (maladie respiratoire liée au virus respiratoire syncytial), la grippe saisonnière, la bronchiolite du nourrisson ou encore l’acné. Le plus avancé étant celui sur le VRS, confie le responsable monde de la recherche et développement vaccins. En parallèle, une autre voie s’ouvre pour l’ARNm dans le développement d’autres traitements pour l’oncologie par exemple ou l’immunologie.

Automatisation, rapprochement et big data

Pour faire face à la concurrence, le dernier-né de la galaxie Sanofi mise sur le regroupement de « l’ensemble des activités de la chaîne de valeur de l’activité vaccin » pour accélérer le développement des produits, développe Sabine Vital, responsable des opérations transverses R&D vaccins chez Sanofi et directrice du site R&D de Marcy-L’Étoile.

Les travaux menés s’échelonnent ainsi de la production de plasmide nécessaire à la synthèse de l’ARNm à l’élaboration des processus de production et d’encapsulation, qui seront ensuite transférés à deux autres sites. Car si les lots de vaccins utilisés pour les essais cliniques sont réalisés à Marcy l’Etoile, les vaccins commercialisés à l’avenir seront ainsi produits sur la plateforme de bioproduction modulable, Modulus, de Neuville (nord de Lyon) inaugurée en septembre 2024, et le packaging à Val-de-Reuil (Eure).

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L’enveloppe de120 millions d’euros investie dans ce projet, co-financée par l’Union européenne et la Région, à hauteur de 8 millions d’euros pour ce dernier, a ainsi pour objectif de faire « gagner en efficacité » le groupe sur le développement de ses futurs vaccins.

Ce, en rapprochant les unités, et en massifiant les capacités de recherches, via, notamment l’automatisation de certaines tâches.

Claire Leroy, responsable de recherche sur l’ARNm évoque également l’usage du machine learning et de l’IA. Et Jean-François Toussaint, un investissement dans la Data Science pour traiter l’ensemble des données générées par les recherches et partagées à l’échelle du groupe.