Témoin de la fusillade dans un Subway, un élu rennais raconte la violence de la scène

Sa voix trahit une forme de sidération. A la fois détaché et sous le choc. Jeudi après-midi, Nicolas Boucher était présent dans le restaurant Subway de la dalle Kennedy, quand une violente fusillade a éclaté. Sous les yeux de cet élu Modem de la ville de Rennes, trois jeunes hommes ont été la cible de tirs à la kalachnikov. Une scène qui n’a duré que quelques secondes, avant que les tireurs ne prennent la fuite à pied, puis dans une voiture qui les attendait. Une Peugeot 2008 qui a été retrouvée calcinée peu de temps après. Ce vendredi, quatre individus soupçonnés avaient pu être interpellés avec l’appui du RAID. Ils sont actuellement en garde à vue. La fusillade, qui a fait quatre blessés, a jeté un froid glacial dans ce quartier qui fait l’objet d’une violente guerre de territoire sur fond de trafic de stupéfiants. Au lendemain des tirs, l’élu d’opposition nous a raconté l’incroyable scène, qui s’est déroulée en plein jour, au milieu de passants apeurés.

Il était un peu moins de 17h30 jeudi quand Nicolas Boucher a vu trois jeunes hommes pénétrer dans la sandwicherie. « Ils étaient âgés d’une vingtaine d’années. Ils sont rentrés et directement ils se sont assis juste à côté de moi. Ils n’avaient pas l’air sereins. » Quelques secondes plus tard, les portes automatiques de la sandwicherie où se trouvait une douzaine de personnes s’ouvrent et laissent approcher trois hommes, dont deux armés de Kalachnikov.

« Il y a une femme qui a crié en disant à tout le monde de se mettre à terre. Je me suis jeté à terre et puis j’ai entendu cinq ou six détonations. Les trois jeunes qui s’étaient assis ont tous été blessés. Une balle a traversé la jambe de l’un d’entre eux. L’autre avait du sang partout sur son jogging. Et le troisième était blessé à l’abdomen. J’étais inquiet pour lui. »

C’est Charles Compagnon, leader de l’opposition avec lequel il prenait un café, qui a emmené les trois blessés dans la réserve. « Il était face à eux. S’il ne s’était pas couché, je ne sais pas s’il serait encore là », témoigne Nicolas Boucher.

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies

Après ces quelques détonations, les tireurs sont partis. Une vidéo captée par un riverain montre trois hommes en noir prendre la fuite, arme à la main. Plusieurs rafales sont tirées ici et là, alors que des passants tentent de se cacher. Les trois hommes grimpent dans une Peugeot 2008 qui les attendait et prennent la fuite. A l’intérieur du restaurant, les témoins de cette scène sont sous le choc. « Après les tirs, je suis sorti du restaurant pour m’assurer que les tireurs étaient partis. Une petite fille qui était là s’est mise à hurler. Les trois jeunes criaient :  »Je suis touché, je suis touché ! » Ils ne pouvaient pas marcher. On leur a donné de l’eau en attendant les pompiers. Le temps m’a apparu très long. Plus le temps passe et plus je me dis que ce que j’ai vécu n’est pas anodin », poursuit l’élu. Une enquête pour « tentative de meurtre en bande organisée » a été ouverte.

« Les gens veulent juste vivre sereinement »

La police est ensuite arrivée pour faire sortir les nombreux jeunes qui voulaient pénétrer dans le restaurant voir leurs amis blessés. Choqué, mais pas résigné, Nicolas Boucher se dit « déterminé » à poursuivre sa mission d’élu d’opposition. « Je pense à mille choses depuis hier soir. Je ne veux pas cibler particulièrement Nathalie Appéré. Mais je suis fatigué d’entendre toujours le même refrain. Les gens, ils s’en foutent de savoir si c’est la faute de l’État ou de la ville. Ils veulent juste vivre sereinement. ». « La présence en nombre d’effectifs policiers doit impérativement se poursuivre et durer. Comme doit se poursuivre à Villejean, et sur tout le territoire la lutte collective et déterminée contre le narcotrafic et les violences insupportables qu’il génère », a réagi la maire PS Nathalie Appéré.

La police scientifique était présente le jeudi 17 avril sur la dalle Kennedy, quartier Villejean, à Rennes, après une fusillade qui a fait quatre blessés.  - D. Meyer/AFP

Ce nouvel épisode de violences sur fond de guerre de territoire ravive les craintes des policiers de voir les règlements de compte se multiplier. « Tout le monde a peur. Les habitants ont peur, mais les collègues aussi ont peur. On parle de tirs à l’arme automatique, en plein jour, au milieu de la population, devant des enfants. Ce sont des armes de guerre ! Ça veut dire qu’à Rennes, ça peut tirer en plein jour, à n’importe quelle heure et n’importe quel endroit », s’agace Frédéric Gallet, délégué départemental du syndicat Alliance, avant de prévenir. « Ce n’est pas la première fois et ce ne sera pas la dernière. Ce que l’on demande, ce sont des moyens humains pour lutter contre ces trafics. Tant qu’il n’y aura pas de véritable réponse pénale, ça continuera. » En novembre, un enfant de 5 ans avait été touché d’une balle dans la tête alors que son père tentait de fuir le quartier de Maurepas.

Déjà présente dans la capitale bretonne depuis quelques jours, la CRS82 va rester à Villejean, le temps de sécuriser ce quartier qui compte de nombreux points de deal. Le préfet d’Ille-et-Vilaine doit rencontrer les effectifs policiers dans l’après-midi.



Aller à la source