Sur la planète rouge, même les phénomènes météorologiques prennent une tournure spectaculaire. Le rover Perseverance de la NASA, chargé d’explorer le sol martien, a récemment immortalisé une scène rarissime : une tornade de poussière géante “avalant” une plus petite, dans ce que les chercheurs décrivent comme un acte de “cannibalisme martien”.
Une rencontre tourbillonnante immortalisée
Le 25 janvier 2025, au 1 399e sol (jour martien) de sa mission, Perseverance a filmé une scène étonnante. Deux diables de poussière, ces tourbillons convectifs caractéristiques de Mars, se sont croisés sur la plaine de Jezero. L’un, plus petit, se déplaçait dans le sillage d’un autre, bien plus imposant. En s’en approchant de trop près, il a été littéralement absorbé dans le vortex du plus grand.
Une telle collision entre deux tourbillons est extrêmement rare, et cette séquence constitue l’une des meilleures captations jamais réalisées d’un tel phénomène sur une autre planète.
« Les tourbillons convectifs, aussi appelés diables de poussière, peuvent être assez diaboliques », ironise Mark Lemmon, chercheur principal au Space Science Institute de Boulder (Colorado). « Ils ramassent la poussière sur leur passage et réduisent la visibilité sur de grandes distances. »
Un phénomène à grande échelle
Selon les estimations des scientifiques, le plus grand tourbillon filmé faisait environ 65 mètres de large, contre 5 mètres pour le plus petit. Leur hauteur n’a pas pu être déterminée précisément, car elle dépassait le champ de vision du rover, placé à environ 800 mètres. Cependant, un tourbillon similaire, observé plus tôt dans la mission, mesurait près de 2 kilomètres de haut – soit cinq fois la taille de l’Empire State Building.
Le diable de poussière principal se déplaçait à plus de 16 km/h, un rythme soutenu dans l’atmosphère ténue de Mars.
« Si vous avez de la peine pour le petit tourbillon, sachez que le plus grand n’a probablement pas survécu longtemps non plus », ajoute Lemmon. « Sur Mars, ces phénomènes durent rarement plus d’une dizaine de minutes. »
Un enjeu scientifique majeur
Au-delà de l’aspect spectaculaire, ces observations ont une importance scientifique capitale. Les diables de poussière sont responsables d’environ 50 % de la poussière en suspension dans l’atmosphère martienne, influençant ainsi le climat global de la planète.
Ils constituent également des indicateurs précieux des conditions atmosphériques : direction et vitesse du vent, températures au sol, stabilité de l’atmosphère, etc. Comprendre leur fonctionnement aide donc à modéliser la météo martienne, mais aussi à anticiper les conditions auxquelles pourraient être confrontées de futures missions humaines.
Une traque délibérée
Le rover Perseverance, qui explore actuellement le cratère Jezero, traque activement ces tourbillons. La NASA a équipé le robot d’instruments capables d’enregistrer non seulement des vidéos, mais aussi des sons. En 2021, Perseverance avait d’ailleurs capté le tout premier enregistrement audio d’un diable de poussière martien, une première historique.
Depuis les premières images prises par les orbiteurs Viking dans les années 1970, notre compréhension de ces phénomènes n’a cessé de progresser. Mais jamais encore un “cannibalisme martien” n’avait été capturé avec autant de clarté.