
«Un temps de Parisiens »… Comprenez merdique, pourri et déprimant. Dans les troquets, chez des amis ou même au bureau, les conversations depuis le début à l’année à Marseille, et encore plus depuis le printemps, tournent régulièrement autour de la météo qui se fait remarquer par son record de pluie et un déficit historique d’ensoleillement. Un sujet qui d’ordinaire n’en est pas un à Marseille, plus habituée au beau fixe qu’au plafond nuageux bas.
« J’ai voulu faire comme si c’était l’été hier en allant me baigner et en restant lire à la plage, résultat je suis malade », constate amèrement Manon. « C’est déprimant d’ouvrir ses volets le matin et de constater un temps de parisien », maronne la jeune trentenaire. Un sentiment que confirme Paul Marquis, météorologue qui anime notamment le compte la@Météo_du_13, qui remarque : « C’est un sujet quotidien, mes amis, ma famille, ne me parle que de ça », avant d’illustrer son propos en chiffres.
La France à l’envers
« Selon les relevés de la station météo de Marignane installée en 1920, jamais un mois de mars n’avait été aussi pluvieux, avec un excédent de 500 %. » Le corollaire à cela est un déficit historique d’ensoleillement, avec « 434 heures de soleil seulement entre le 1er janvier et le 31 mars. Du jamais vu depuis trente-quatre ans », précise Paul Marquis. Et si l’on ajoute les 73 heures de soleil cumulées lors de la première quinzaine d’avril, le total n’est guère meilleur et affiche un déficit depuis ce début d’année de 90 heures de soleil par rapport à 2024 et de 120 heures par rapport à 2023, selon des données d’Info climat. Cela fait près de 30 % de temps de soleil en moins. De quoi devenir fada.
Plus inquiétant, cette tendance aux « printemps compliqués perdure depuis deux/trois ans. On enchaîne trois semaines de mauvais temps pour une semaine de temps sec, alors que d’ordinaire c’est plutôt l’inverse », observe le météorologue. Un phénomène qui ne se limite pas qu’au printemps, bien que cette saison soit propice à le remarquer.
La faute à un anticyclone qui se fait rare depuis « octobre 2023 », retrace Paul Marquis. « Même lors de l’été 2024, la moyenne des pressions est restée plutôt basse ». Et cette absence d’anticyclone favorise « le vent du sud, le Sirocco, qui amène les pluies sableuses du Sahara et vient avec ce ciel laiteux ». Pire encore, pour les Marseillais prompts à être si fiers de l’habituelle douceur de vivre en Provence : le nord de la France et de l’Europe a connu un temps plus sec et plus ensoleillé qu’ici. Valencienne (Nord) compte plus d’heures de soleil que Marseille. « La carte de France est inversée », souligne le météorologue.
Des parasols en parapluies
Du coup, aux terrasses de cafés, les parasols sont de sortie, mais ils ne servent pas à s’abriter du soleil. « On en a marre », râle Maria qui indique en être venue à prendre des complémentaires alimentaires, notamment de la vitamine D, que crée naturellement le corps avec l’exposition au soleil. Ce mercredi encore, les shorts et les robes de saisons sont restés aux placards. Sous une bruine toute bretonne, le thermomètre n’excède pas les 15 °C. Une température digne du mois de février qui surprend les touristes ou nouveaux venus. A l’image de Théo, débarqué en février de Bruxelles avec sa compagne pour s’installer au Panier, et « qui ne s’attendait pas à ça ».
Une indigence météorologique qui ne devrait pas changer dans l’immédiat. Vous pouvez remballer vos envies de bains de soleil pour Pâques. « Le temps restera perturbé encore jusqu’à fin avril et j’ai du mal à croire qu’un temps sec et stable revienne pour mai, qui sera toutefois plus sec », prévoit Paul Marquis sur ses tendances de moyens termes. Avant d’annoncer la couleur : « Comme ces dernières années, il faudra attendre mi-juin pour que l’été s’installe. »