OPINION. « Fessenheim doit devenir le symbole d’une ambition industrielle retrouvée », par Raphaël Schellenberger, député non-inscrit du Haut-Rhin


C’est en regardant notre propre impuissance à trancher que l’on mesure l’ampleur de nos renoncements. L’Allemagne, pays des demi-tours énergétiques, a claqué la porte du nucléaire dans une précipitation idéologique, pour mieux se jeter dans les bras du charbon et du gaz russe. Un fiasco stratégique devenu un cas d’école. Et pourtant, c’est à ce voisin que la France s’apprêterait à demander son avis pour relancer un projet industriel d’avenir sur le sol alsacien.

Le 7 avril dernier, la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) a rendu son avis sur le projet de Technocentre à Fessenheim, une initiative portée par EDF visant à recycler des matériaux faiblement radioactifs issus du démantèlement d’installations nucléaires. Un projet stratégique, vertueux, et, disons-le, logique. Mais au terme d’un débat de 4 mois et de plusieurs centaines de milliers d’euros dépensés pour « débattre », la CNDP propose de « veiller à prendre en compte la sensibilité allemande« . C’est-à-dire de renoncer à décider seuls, chez nous, pour nous.

Ce n’est pas un simple détail administratif. Ce glissement de la souveraineté à la discussion sans fin illustre jusqu’à l’absurde le mal français : une commission particulière, désignée par une commission nationale, convoquée pour organiser un débat public sur un projet industriel, lui, clair, mais dont l’issue dépendrait d’avis non contraignants et d’arbitrages ultérieurs potentiellement confiés à d’autres commissions. Une mise en abyme démocratique dans toute sa splendeur — jusqu’à frôler la parodie institutionnelle.