OPINION. « Déserts médicaux : le planisme va encore frapper »


Parmi les anciens joyaux de la couronne française, il y a la santé publique. L’accès universel aux soins, un hôpital public de qualité et une sécurité sociale efficace. Après 40 ans de dirigisme à outrance, d’idéologie égalitaire et de sous-investissement public, notre système de santé craque de partout au détriment du patient. On l’observe en ville avec une difficulté croissante à rencontrer un spécialiste et la saturation des services d’urgence. On l’observe également en milieu rural avec la fermeture des petits hôpitaux et la pénurie de médecins généralistes. Cette difficulté de l’accès aux soins pour nos compatriotes habitant en milieu rural est devenue extrêmement aiguë comme le montrent plusieurs études. Popularisé par les médias, le concept de désert médical s’est imposé comme une évidence. Il est défini techniquement comme un territoire caractérisé par une offre de soins insuffisante, mesurée notamment à travers l’accessibilité potentielle localisée à un professionnel de santé et qui inclut le temps d’accès à un médecin, le volume d’activité de ce médecin et la demande théorique de soins dans la zone concernée.

Il est inutile de sortir de l’École Nationale de la Santé publique ou l’ancien ENA pour identifier les deux causes majeures d’un tel échec de la santé publique. En premier lieu, la raréfaction du nombre de médecins en milieu rural est la conséquence directe et évidente de la pénurie de médecins.  Aujourd’hui on formerait autant de médecins que pendant les années 1970 alors qu’il y a 15 millions de Français en plus, avec un fort vieillissement de la population. Nous n’avons pas fini de payer cet absurde numerus clausus qui limitait les places en études de médecine. En 2024 Gabriel Attal avait envisagé une augmentation de 70% sur 10 ans sans oser le supprimer. Cette stratégie de pénurie a provoqué l’exil d’un grand nombre d’étudiants voulant devenir médecin qui ont suivi des études de médecine en Belgique ou dans les pays de l’Est. La pénurie a conduit également au recours à des médecins étrangers dans des conditions insatisfaisantes. En deuxième lieu, il y a la politique massive de fermeture des petits hôpitaux ruraux au profit de gros hôpitaux urbains au prétexte fallacieux d’efficacité et d’économie d’échelle. Là aussi il y a un lien direct entre la fermeture des petits hôpitaux ruraux et la désertification médicale. Accéder à un service d’urgence ou à une maternité a été rendu compliqué pour nos concitoyens ruraux du fait de ces politiques centralisatrices.

Les chiffres sont éclairants. Selon la DREES, il y a eu 82 fermetures d’hôpitaux publics entre 2013 et 2022 sur un total de 1338. Selon Trading Economics, le nombre de lits d’hôpitaux en France est passé de 8,5 pour 1000 habitants à 5,5 en 2022 contre 7,6 en Allemagne. Le nombre de médecins est resté stable à un niveau faible de 3,27 médecins pour 1000 habitants entre 1990 et 2022 alors qu’en Allemagne il est passé au contraire de 3 à 5.