
17 avril 2025 à 09h19
Mis à jour le 17 avril 2025 à 16h24
Durée de lecture : 5 minutes
La violente politique fascisante menée contre les sciences par Donald Trump aux États-Unis commence à porter concrètement ses fruits. À force de désorganiser la production de connaissances, celle-ci commence à s’amoindrir. Ainsi en est-il des données provenant des radiosondes météorologiques étasuniennes : leur flux a baissé de 10 % depuis le mois de mars, d’après le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (ECMWF, selon son sigle anglophone).
Ces radiosondes sont des instruments envoyés dans l’atmosphère grâce à des ballons, pour en étudier la composition et les dynamiques. Les données qu’elles récoltent sont extrêmement importantes pour l’ensemble des sciences climatiques et météorologiques. Ces sondes mesurent la température, la pression et l’humidité de l’atmosphère. Coordonnées entre elles, ces informations indiquent aux météorologues la dynamique des vents et leur permettent de modéliser les phénomènes météo.
« Les radiosondes sont la colonne vertébrale du système mondial d’observation, fournissant des informations de haute précision à la base des prévisions météorologiques », nous précise par courriel Florence Rabier, directrice générale du ECMWF.
Interdépendances mondiales
Outre les prévisions météo, ces sondes sont également une pièce maîtresse de la surveillance du climat. « Chaque donnée perdue constitue une perte pour l’enregistrement de ce qui arrive à la planète et pour la compréhension de l’évolution du climat », dit encore la chercheuse.
Ces données sont complémentaires de celles recueillies par les satellites et sont indispensables pour calibrer et valider ces observations spatiales. Elles constituent, en outre, un élément clé pour nourrir et valider les modèles de prévision météo et climatiques développés par les chercheurs.
Les scientifiques de l’ECMWF sont d’autant plus inquiets de cette baisse observée dans la quantité de données que la collaboration internationale est particulièrement cruciale en météorologie et climatologie. Prévoir des phénomènes météorologiques dans telle ou telle région nécessite de suivre ce qui se passe tout autour du globe, et donc d’avoir accès aux données produites dans le monde entier.
Cette interdépendance entre météorologues internationaux est encore plus cruciale lorsque l’on parle des États-Unis, pays historiquement à la pointe de la recherche et dont les contributions sont essentielles. Les attaques trumpistes et annonces de coupes budgétaires préoccupent donc Florence Rabier, qui voit dans cette chute de la production de données « le résultat des récentes décisions ».
Les radiosondes étasuniennes sont régies par le National Weather Service, l’équivalent de Météo-France. Or, ce service appartient à l’Agence étasunienne d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), l’une des cibles privilégiées de l’administration Trump.
Dans le cadre de la vaste entreprise de démantèlement des services publics supervisée par Elon Musk, au nom du président étasunien, la NOAA a vu au moins 800 de ses salariés être licenciés du jour au lendemain. Un temps annulée par une cour fédérale, cette décision a finalement été validée par la justice.
Coupes catastrophiques en 2026
Les choses pourraient largement empirer. Des documents de préparation du budget 2026, envoyés par la Maison Blanche aux agences fédérales et ayant fuité dans la presse, prévoient une coupe cataclysmique de 27 % du budget de la NOAA.
La revue Nature, qui a obtenu ces documents début avril, précise que le Bureau pour la recherche océanique et atmosphérique (OAR), une branche de la NOAA cruciale pour la recherche sur le climat et la prévision des ouragans notamment, serait privée de 74 % de son budget. Tous les programmes de recherche seraient durement touchés si ce projet de budget était validé.
Les mêmes documents prévoient l’annulation pure et simple du déploiement de la nouvelle génération de satellites missionnés pour observer la Terre et son climat, dans les lignes budgétaires de la NOAA et de la Nasa. Cette dernière verrait son budget consacré aux sciences de la Terre divisé par deux.
Pour l’heure, en Europe, le ECMWF assure que son système de prévision météorologique est résilient face aux pertes de données étasuniennes, grâce aux autres informations échangées en temps réel dans le monde, dont les données satellites.
« Les gouvernements du monde entier ont besoin de données météorologiques de haute qualité pour prendre des décisions et réaliser les investissements qui protègent leurs citoyens, rappelle Florence Rabier. Il est important de souligner que nous plaidons fermement en faveur du partage et de l’échange continus de données météorologiques, climatiques et du système terrestre connexe, conformément à la politique de l’Organisation météorologique mondiale. »
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