
Sur Radio J, Charles de Courson, député LIOT de la Marne, a affirmé jeudi 10 avril 2025 : « À la Libération, la feuille de paie, c’était trois lignes. On est passé de trois lignes à 27 ». Cette affirmation est exacte. Dans les années 1950, une fiche de paie se limitait bien à trois lignes : le salaire brut, les cotisations sociales et le salaire net. S’y ajoutaient quelques mentions obligatoires comme le nom et l’adresse de l’entreprise ainsi que les coordonnées du salarié, ce qui pouvait faire monter le document à 5 ou 6 lignes, mais nos bulletins étaient donc légers et lisibles.
Aujourd’hui, le bulletin de paie comporte plutôt entre 40 et 50 lignes, encore plus que les 27 évoquées par le député Charles de Courson. De nombreuses mentions se sont ajoutées au fil des décennies, notamment celles liées à la protection sociale, avec, par exemple, des cotisations différentes selon qu’il s’agit de maladie ou d’accident du travail.
Une réforme freinée par la dissolution
Dans le cadre du choc de simplification voulu par le président de la République, le gouvernement avait proposé en 2023 de réduire le nombre de lignes à une quinzaine seulement. Dans cette version simplifiée, seuls les éléments de rémunération devaient être présentés en détail, tandis que les prélèvements sociaux auraient été regroupés. Une version plus détaillée aurait cependant été disponible sur demande du salarié. Mais ce projet a pris un coup d’arrêt avec la dissolution de l’Assemblée nationale et n’est plus d’actualité.
**Ce n’est pas la première tentative de réduction de la complexité des bulletins de paie : en 1998, la mention des cotisations patronales est allégée ; en 2005, certaines cotisations sont regroupées sur une même ligne ; en 2009, sauf opposition du salarié, la fiche de paie devient dématérialisée et en 2018, la simplification devient obligatoire, y compris dans les PME, avec un objectif de fiche de paie tenant sur une page et comptant moins de 20 lignes. Cet objectif ne sera jamais totalement atteint. Paradoxalement, la réforme du prélèvement à la source, introduite en 2019, a ajouté de nouveaux éléments à ce document déjà très dense.
Une exception française
Le bulletin de paie français est l’un des plus complexes au monde, peut-on lire dans un rapport gouvernemental de 2015. Il comportait déjà en moyenne 40 lignes, contre 15 en Allemagne et en Espagne, 12 au Japon et 11 en Chine. Cette complexité s’explique par la spécificité du système fiscal et de protection sociale français, qui varie selon la branche professionnelle, voire l’entreprise dans laquelle on travaille. Certains syndicats défendent également une transparence totale sur les prélèvements, ce qui contribue à la longueur du document. La simplification de la fiche de paie reste donc un véritable serpent de mer, sans solution claire à l’horizon.