L’échec de la médiation entre DAZN et la LFP maintient la L1 dans l’incertitude

Mardi soir, Vincent Labrune pensait sûrement assister à la quasi-remontada d’Aston villa face au PSG le cœur allégé par le divorce acté avec DAZN à la fin de la saison. Sa journée de télétravail avait certes été un peu contestée en interne, mais elle l’avait mené où il le souhaitait, à savoir vers un vote du conseil d’administration en faveur d’un divorce avec le diffuseur principal dès la fin de saison, suivi d’une proposition à la plateforme britannique en vertu de la fin de la médiation du tribunal de commerce de Paris. Proposition consistant en un paiement de 140 millions d’euros pour la fin de saison et une indemnité comprise entre 110 et 125 millions d’euros pour la suivante, demandés au diffuseur.

Manque de bol, les tourments coriaces du patron de la LFP avaient aussi pris leurs billets pour un siège à villa Park au côté de Nasser Al-Khelaïfi et DAZN a donc décidé de refuser les conditions financières de la Ligue. « La médiation n’a malheureusement pas permis de suffisamment rapprocher les points de vue. Il a donc été impossible de trouver – à ce stade – un accord pour une résolution amiable de la situation », a déclaré de son côté DAZN.

La LFP agacée par le « non » de DAZN

Tout est dans le « à ce stade ». Et « à ce stade », il semble que la Ligue soit moyennement satisfaite de la tournure des événements. « C’est quand même le monde à l’envers, peste une source proche de la LFP. Ce sont eux qui ne paient pas. Ce sont eux qui demandent la médiation qui est lancée à l’initiative du tribunal des activités économiques de Paris. Et ce sont EUX qui refusent la proposition du médiateur. »

DAZN avait effectivement ouvert les hostilités en retardant la moitié de son premier versement de 2025 (35 millions d’euros), puis en réclamant en justice 573 millions d’euros « pour manquement observé » et « tromperie sur la marchandise », s’estimant pénalisée par le piratage et des conditions d’exploitation insuffisantes. Autant de raisons qui expliqueraient le fiasco des seulement 550.000 abonnements vendus.

Vincent Labrune et la LFP n’ont toujours pas trouvé de porte de sortie dans la crise avec DAZN - J.E.E/SIPA

Le feuilleton patine, et, faute de solution immédiate, la Ligue espère au moins percevoir les deux dernières tranches de 70 millions d’euros prévues par le contrat liant les deux parties, la première étant attendue le 30 avril. En VO, ça donne : « Nous attendons désormais que DAZN exécute pleinement l’ensemble de ses obligations. » Rien n’est moins sûr.

Les relations ne risquent pas de s’améliorer par magie. La plateforme britannique aimerait renégocier le contrat avec des parts variables importantes, là où la Ligue sauterait volontiers dans le premier canot de sauvetage venu pour se donner un minimum de latitude pour préparer la suite, à savoir produire ENFIN une chaîne LFP, en association avec la plateforme Max pour ce qui relève de la distribution.

« Les moins de 45 ans ne payent pas pour le contenu »

« Aller avec Max, c’est sans doute mieux que rien, observe Pierre Maes, spécialiste de la question des droits TV. Mais je n’oserais même pas imaginer combien d’abonnés a Max aujourd’hui. Ça ne doit pas être énorme. Pour la LFP, partir de zéro ou partir avec Max, c’est quoi ? » D’autant plus que le plan optimiste révélé par L’Equipe prévoyait 1,8 million d’abonnés à la fin de la première saison et 553 millions d’euros de revenus. Ce qui voudrait dire que la Ligue et Max réussiraient là où DAZN a échoué.

« La difficulté, ce n’est pas de produire, ce n’est pas de faire des programmes. C’est d’aller chercher les abonnés avec les dents et surtout de les conserver. Aujourd’hui, on peut quand même dire, sans vraiment se tromper, que ceux qui payent sont chez Canal. Et on sait que lancer un produit de télévision en péage monoproduit, c’est extrêmement difficile. Je ne dirais pas qu’il n’y a aucune chance, mais ce n’est pas loin. De plus, on sait que les jeunes, c’est-à-dire en dessous de 45 ans, ne payent pas pour le contenu. Le piratage est florissant. Il n’y a pas pire comme condition pour lancer ce type de produit. »

Qu’elle soit « condamnée » à rester un an de plus avec DAZN où qu’elle réussisse à s’en libérer, la Ligue doit embrasser les problématiques dont elle s’est longtemps déchargée, laissant au seul diffuseur le loisir de résoudre l’équation insoluble. « Aujourd’hui, DAZN se plaint du piratage, mais si le projet de chaîne la Ligue devait aboutir, il devra aussi combattre le piratage, conclut le spécialiste en droits TV. Ce sera son ennemi numéro un. »

Nos articles sur les droits TV du foot

La réalité est la suivante : au point où en est la LFP, il n’y aura pas de solution miracle, et croire en un divorce rédempteur serait une énième preuve de naïveté. Quelle que soit la route empruntée par Vincent Labrune et consorts, elle sera longue.



Aller à la source