La «plateformisation» de notre quotidien mérite un vrai débat démocratique – Le Temps

Sur la réglementation des plateformes numériques, le Conseil fédéral semble s’être lancé dans une partie de mikado: s’il bouge, il perd. On l’a vu s’agissant des réseaux sociaux et des moteurs de recherche. Il existe un projet pour encadrer leurs activités. Le Conseil fédéral devait enfin en parler lors de sa séance du 16 avril, après plus d’un an de retard sur le calendrier initial. Mais il a finalement décidé de repousser la question à plus tard, sans s’en expliquer.

Sur ce point, tout l’enjeu porte sur le pouvoir d’opinion exercé par les opérateurs de ces plateformes. Ceux-ci décident, à travers des algorithmes opaques, quand, comment et quelles informations sont diffusées aux utilisateurs de leurs services. La manière dont ils favorisent des contenus viraux, souvent violents ou relevant de la désinformation, a largement été documentée ces dernières années.

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Cela soulève des questions concrètes dans un pays qui pratique la démocratie semi-directe, par exemple en termes d’opérations d’influence orchestrées à l’étranger. C’était d’ailleurs ces différents aspects que le Conseil fédéral avait mis en avant en 2021 lorsqu’il avait fait part de son souhait de lancer un large débat sur les plateformes de communication et leurs effets.

Un enjeu majeur

Mais les autres types de plateformes numériques amènent aussi leur lot de questionnements. Les places de marché comme Amazon et Temu, les magasins d’applications tels que l’App Store d’Apple ou le Play Store de Google, les systèmes d’exploitation de type Windows, iOS ou Android exercent une position dominante qui leur permet d’évincer la concurrence, d’imposer des prix ou encore de façonner les règles de la compétition dans certains secteurs comme le commerce en ligne. Autant de mécanismes qui peuvent potentiellement nuire à la concurrence et donc aux consommateurs.

La «plateformisation» de l’économie et des interactions sociales est un enjeu majeur. Elle amène des effets nouveaux, qui nécessitent d’adapter les paradigmes qui s’appliquaient jusqu’alors. En refusant de mettre son projet de loi en consultation, le Conseil fédéral empêche ce débat d’avoir lieu. Il laisse de fait à des acteurs privés, qui opèrent à l’étranger, le soin de fixer les modalités de leurs activités en Suisse. Les citoyens et les entreprises suisses ont tout à perdre avec une telle stratégie.

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