
La Banque centrale européenne a abaissé jeudi son taux directeur de 0,25 points, alors que les craintes inflationnistes s’estompent et que les tensions commerciales mondiales pèsent sur l’économie européenne en difficulté.
La décision très attendue de la BCE de ramener son taux de dépôt de 2,5 % à 2,25 % fait suite à la récente imposition par le président américain Donald Trump de droits de douane généralisés sur ses partenaires commerciaux, qui accentue les risques d’une récession mondiale et conduit les analystes à revoir à la baisse leurs prévisions de croissance pour la zone euro.
Cette baisse intervient également alors que l’inflation dans la zone euro est tombée à 2,2 % le mois dernier, soit un niveau légèrement supérieur à l’objectif de 2 % fixé par la BCE et bien en deçà du pic de 10,6 % atteint en octobre 2022.
L’inflation des services, un indicateur clé des pressions sur les prix intérieurs, est passée de 3,7 % à 3,4 % entre février et mars de cette année. L’inflation sous-jacente, qui exclut les prix volatils des produits alimentaires et de l’énergie, a reculé de 2,6 % à 2,4 %, son niveau le plus bas depuis janvier 2022.
Les experts s’accordent largement à penser que les politiques de Donald Trump auront un effet déflationniste, car les exportations chinoises bon marché sont redirigées vers l’Europe et le renforcement de l’euro fait baisser le prix des importations. La forte baisse récente des prix du pétrole a encore atténué les pressions inflationnistes.
L’UE a également récemment suspendu les droits de douane de rétorsion sur les produits américains qui auraient pu entraîner une hausse du coût des produits importés des États-Unis.
« L’économie de la zone euro a renforcé sa résilience face aux chocs mondiaux, mais les perspectives de croissance se sont détériorées en raison de la montée des tensions commerciales », a déclaré la BCE dans un communiqué.
Elle a ajouté que « l’incertitude accrue » des ménages et des entreprises et « la réaction négative et volatile des marchés » aux politiques de Trump constituent des risques supplémentaires pour les perspectives économiques de la zone euro.
Le mois dernier, la BCE a abaissé ses prévisions de croissance pour la zone euro pour cette année, les ramenant de 1,1 % à 0,9 %, une prévision que de nombreux économistes jugent encore trop optimiste.
« L’impact sur la croissance des droits de douane réciproques, de l’incertitude et des conditions financières devrait dépasser les prévisions de la BCE », ont écrit les analystes de la Deutsche Bank dans une note publiée ce matin, après avoir révisé à la baisse leurs prévisions de croissance pour la zone euro, les ramenant de 0,8 % à 0,5 % pour 2025.
L’inflation dans la zone euro a grimpé en flèche en 2022 après que l’invasion de l’Ukraine par la Russie a provoqué une flambée des prix de l’énergie, conduisant la BCE à relever ses taux, alors négatifs, à un niveau record de 4 %. La banque a réduit ses taux à sept reprises depuis juin dernier.
Les investisseurs s’attendent actuellement à deux ou trois nouvelles baisses avant la fin de 2025, ce qui ramènerait le taux directeur de la banque entre 1,5 % et 1,75 %.
Les analystes interrogés par Bloomberg estiment toutefois que le taux pourrait être fixé entre 1,25 % et 2,25 % d’ici la fin de l’année.
La présidente de la BCE, Christine Lagarde, s’adressera aux journalistes à 14h45 aujourd’hui.