
Un comité s’est réuni ce mercredi matin à Pau pour évoquer la présence du loup dans le département. La plupart des éleveurs, impuissants face aux attaques à répétition, ont refusé d’y participer. Ils ont manifesté leur mécontentement devant la préfecture.
« On est à bout », d’un côté. « Il faut que ça s’arrête », de l’autre. Partout, le même discours. Pour les éleveurs présents ce matin à Pau devant la préfecture des Pyrénées-Atlantiques, les jours se suivent et se ressemblent. Ces dernières semaines, les attaques de loup envers les troupeaux se sont multipliées dans le département.
Face à cette situation, un comité s’est réuni pour tenter de trouver une solution viable, entre préservation de l’espèce et sécurité des troupeaux. Conviés, la plupart des éleveurs n’ont pas souhaité y participer. Divisés en deux groupes, les manifestants réunis sous plusieurs bannières syndicales (FDSEA, Jeunes Agriculteurs ou Coordination Rurale) ont fini par se rassembler. « Par expérience, quand on assiste à ces comités et qu’on est minoritaire, on n’est pas écouté, regrette Marion Som, membre des JA 64. C’est sûrement la meilleure solution pour se faire entendre. On veut montrer notre désarroi et demander des actions concrètes de la part des autorités. »
L’éleveuse, basée à Asson, a vu l’un de ses béliers périr dans une attaque au début du mois d’avril. « C’était comme un coup de massue, car ce n’est pas simplement un animal, c’est vraiment une partie de notre travail, de nos efforts quotidiens et de notre vie, souligne-t-elle. C’est une perte économique énorme et un préjudice moral incalculable. »
Marion Som (à droite), récemment touchée par une attaque sur son exploitation d’Asson, a pris la parole.
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© Élise Daycard / France 3 Aquitaine
Chez les éleveurs, un même discours fait l’unanimité. « On exige, comme cela se fait ailleurs, l’élimination des loups, tranche Marion Som. Dans d’autres départements, des prélèvements sont réalisés. Pourquoi pas chez nous ? » Selon elle, il en va du bien-être de la profession. « Je fais ce métier par passion, depuis que je suis toute petite, je ne me suis jamais posé la question de faire autre chose, illustre-t-elle. Mais jamais je n’aurais imaginé un jour avoir la boule au ventre en rendant visite quotidiennement à mes bêtes. »
Interrogé à l’issue du comité, le préfet du département Jean-Marie Girier se dit conscient de l’inquiétude des éleveurs. « Il y a un enjeu de protection du pastoralisme, et c’est ce qu’on a mis comme priorité dans ce groupe de travail, indique-t-il. Le sujet n’est plus tant de garantir la protection du loup que de préserver l’avenir de nos élevages et de nos montagnes. »
Quel que soit leur nombre, ils sont de trop. Ils sont incompatibles avec l’élevage.
Marion Soméleveuse à Asson
Malgré les attaques à répétition, seuls deux spécimens ont été observés pour le moment : un dans le Béarn depuis 2018, l’autre au Pays basque depuis le début de l’année. S’agissant de mâles, selon les autorités, le risque de reproduction ne serait pas imminent. Le préfet admet cependant que le loup « ne peut pas s’installer durablement en meute dans ce territoire. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, il ne faut pas que cela le devienne demain. Cela serait un risque majeur pour notre élevage. »
Le comité départemental a notamment cartographié la présence du loup dans les Pyrénées-Atlantiques.
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© Élise Daycard / France 3 Aquitaine
Ouvrant la porte à la solution radicale plébiscitée par les éleveurs, le représentant de l’État précise qu’il n’est « pas interdit d’éliminer le loup », étant donné que l’animal se trouve désormais « dans un bon état de conservation » et n’est plus considéré comme une espèce en voie de disparition.
En plus des gardiens de troupeaux qui protègent déjà 150 élevages, de même que les chiens de garde ou les clôtures électrifiées « grâce à une aide de l’État d’un million d’euros », il rappelle que les tirs de défense sont autorisés en cas d’attaque.
Ce discours peine à convaincre Laurent Dallos, installé à Arros-de-Nay. L’éleveur dit avoir subi 14 attaques au total, dont deux en huit jours récemment, et cherche toujours la solution miracle. « Le tir de défense on l’a déjà, mais on peut le rater, regrette-t-il. Même en essayant de le garder à distance avec des chiens, des filets, n’importe quoi, il attaque quand même. On ne peut pas rester toute la journée et toute la nuit à le surveiller, et quand on le voit sur les caméras, le temps d’arriver sur place, il a déjà fait des dégâts. »
On en est à 14 attaques, 74 brebis et un Patou morts.
Laurent Dalloséleveur à Arros-de-Nay
Membre de la Coordination rurale, qui a décidé de siéger au sein de ce comité, il n’en ressort pas plus avancé. « Soit on arrête d’élever du bétail en plein air et on passe en hors-sol, soit on enlève le loup, insiste-t-il. Il n’y a pas d’autre solution. »
Selon la préfecture, les mesures de protection et les aides financières de l’État ont tout de même permis de réduire de 85 % les attaques depuis 2018. Cette année-là, 208 bêtes sont mortes après le passage d’un loup, contre 42 l’an passé.