
Dix ans après l’adoption par les États membres de l’ONU des 17 objectifs de développement durable (ODD), censés garantir la prospérité des peuples de la planète d’ici 2030, fort est de constater que le monde est en train d’échouer.
« La dure réalité est que la réalisation des objectifs de développement durable est terriblement en retard, aggravée par un déficit de financement annuel estimé à 4.000 milliards de dollars », a reconnu le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres.
Les principaux coupables sont selon lui l’explosion de la dette publique, la chute des engagements des pays riches en matière d’aide au développement, la montée des barrières commerciales et, de manière générale, « une remise en question dangereuse de la collaboration mondiale ».
À l’approche de la quatrième conférence internationale sur le financement du développement, qui aura lieu à Séville, en Espagne, du 30 juin au 3 juillet prochain, M. Guterres a appelé à un sursaut collectif.
Trois priorités
Dans le cadre d’un forum d’une durée de deux jours, organisé au siège de l’ONU, à New York, par le Conseil économique et social (ECOSOC), M. Guterres a défini trois priorités urgentes : réduire les coûts de la dette, mobiliser toutes les sources de financement disponibles, aussi bien au niveau national que dans le cadre d’une coopération fiscale internationale, et revitaliser les banques multilatérales de développement en triplant leur capacité de prêt.
« Si la finance est le carburant du développement, les banques multilatérales de développement en sont le moteur, et ce moteur doit être relancé », a-t-il insisté.
De telles mesures devraient selon le Secrétaire général permettre de surmonter le coût prohibitif de l’endettement, qui « assèche les investissements publics » dans l’éducation, la santé, les infrastructures et la transition énergétique.
Hausse des droits de douane
Lors du point de presse quotidien des Nations unies, à l’issue de la séance d’ouverture du forum, Bob Rae, le président de l’ECOSOC, a quant à lui souligné l’impact sur le développement de l’incertitude actuelle en matière de commerce international.
« Les tensions commerciales et tarifaires récentes ralentissent dramatiquement la croissance économique mondiale », a-t-il déclaré, en référence à la hausse des droits de douanes annoncée en mars par l’administration américaine et la guerre commerciale qui s’en est suivie entre les États-Unis et la Chine.
M. Rae a plaidé pour un dialogue approfondi des États membres avec le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et l’agence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED).
« Dans tous leurs efforts pour faire face à leurs propres problèmes, les économies avancées ne doivent pas perdre de vue les problèmes que nous avons tous en commun », a-t-il insisté. « Il n’y a pas de solution nationale à ces problèmes, il ne peut y avoir que des solutions mondiales ».
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres (à droite), au forum de l’ECOSOC sur le suivi du financement du développement. À sa gauche, se trouve Philémon Yang, le président de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Surendettement
De son côté, Navid Hanif, le Sous-Secrétaire général de l’ONU au développement économique, a noté que 68 pays étaient aujourd’hui confrontés à un risque de surendettement, dont 10 sont déjà en situation critique.
Le poids global de la dette des économies en développement dépassé les 1.400 milliards de dollars par an. Dans plus de 50 pays en développement, le remboursement de la dette est désormais supérieur à 10 % des recettes publiques annuelles, un seuil qui laisse, selon M. Hanif, présager des défauts de paiement futurs.
« Beaucoup de pays doivent ainsi choisir entre défaut de développement ou défaut de paiement », a-t-il résumé.
Appel à une hausse des financements
En toile de fond, l’ambition de réformer l’architecture financière internationale reste prégnante, afin de gagner en efficacité et de mieux aligner les flux financiers avec les besoins du développement durable.
« Le financement du développement est essentiel pour l’avenir du multilatéralisme », a estimé António Guterres, dans son discours d’ouverture au forum de l’ECOSOC. « Il en va de la conviction dans la puissance des solutions globales aux problèmes mondiaux ».