En 100 jours, Trump a plongé les États-Unis dans une dystopie climatique

Le 19 novembre 2024, la mégafusée Starship du milliardaire Elon Musk décollait dans le ciel texan. Une nouvelle étape de la conquête spatiale de Mars, aux premières loges de laquelle jubilait Donald Trump. À deux mois de son investiture à la tête des États-Unis, le tribun crachait déjà son ambition débridée aux yeux de tous. Seulement, l’opération échoua et l’engin spatial s’est écrasé dans le golfe du Mexique. Aurait-il dû y déceler un signe prémonitoire ?

Cinq mois plus tard, la scène semble s’être muée en allégorie. D’après le New York Times, jamais aucun président étasunien n’avait affiché une cote de popularité aussi basse que le Républicain au centième jour de son mandat. Aucun… excepté lui, en 2017, lors de son premier mandat. Peu importe. L’homme de 78 ans est prêt.

« Donald Trump a retenu les erreurs du passé, assure à Reporterre le politologue franco-étasunien Romuald Sciora. Cette fois-ci, il a une colonne vertébrale politique solide. Il est devenu l’incarnation de l’ultradroite. » Et son projet est limpide : mener une contre-révolution blanche, patriarcale et climatodénialiste.

L’ancienne star de téléréalité avait promis un retour fracassant. Il a tenu parole. Le 20 janvier, jour de son entrée à la Maison Blanche, il paraphait 26 décrets sous une pluie de flashs. Parmi eux, le retrait de l’Accord de Paris et l’abandon d’une série de mesures écologiques prises sous l’administration de Joe Biden. Des interdictions des forages pétroliers, elles aussi, sont passées à la trappe. « Nous allons forer, bébé, forer », répétait à tue-tête le nouveau locataire du bureau ovale.

« Inonder la zone de merde »

Trois mois se sont écoulés depuis cette arrivée en fanfare. Le détricotage des politiques climatiques continue à vitesse de l’éclair, avec déjà plus de 130 décrets signés. Un record absolu, enrobé d’un story telling parfaitement huilé. « Trump est un showman, poursuit le chercheur associé à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris). Sa signature à peine griffonnée, il jette les stylos à ses fans dans une ambiance pareille à celle des concerts d’Elvis Presley. »

Ce funeste théâtre camoufle toutefois une stratégie calibrée. Ancien conseiller du président, et auteur d’un salut nazi en février, Steve Bannon l’a résumée en cinq mots : « Inonder la zone de merde. » En d’autres termes, asphyxier les contre-pouvoirs par une quantité démentielle de mesures.

Pour Trump, « celui qui sauve sa patrie ne viole aucune loi »

Et ça fonctionne. Les Démocrates, de Joe Biden à Barack Obama, se murent – hormis Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez -dans un silence assourdissant. Le Congrès, où domine le rouge républicain, obéit au doigt et à l’œil. Et les juges fédéraux ont beau réagir, Donald Trump les nargue en citant Napoléon : « Celui qui sauve sa patrie ne viole aucune loi. »

Aussi vif soit-il aujourd’hui, l’écho médiatique international pourrait finir par s’émousser. Académiciens, intellectuels et citoyens du pays semblent en état de sidération. « Voyons les choses comme elles sont, soupire Romuald Sciora. Début avril, 500 000 personnes ont défilé dans la rue pour crier leur désaccord à Donald Trump. Elles étaient plus de 17 millions, en 2020, pour le mouvement Black Lives Matter », qui dénonçait le racisme envers les Noirs.

Saccager la politique climatique

Le champ libre, Donald Trump poursuit inlassablement son travail de sape à l’encontre du climat. Et les pays les plus précaires en pâtissent. Le 7 mars, les États-Unis ont quitté le Fonds sur les pertes et dommages, un mécanisme établi deux ans plus tôt, lors de la COP28 à Dubaï, pour dédommager les nations du Sud au lendemain de catastrophes météorologiques. Le Républicain a aussi jeté aux oubliettes les promesses faites à l’Afrique du Sud, l’Indonésie et le Vietnam de les aider à sortir des fossiles.

Le 12 mars, une poignée d’heures lui a suffi à saccager 31 réglementations écologiques. À tour de bras, le tribun a assoupli ou supprimé les normes encadrant les centrales à charbon ou encore les émissions de mercure. Le périmètre de la loi interdisant de déverser des polluants dans les eaux navigables du pays a été également bouleversé. Et l’octroi de 20 milliards de dollars (environ 18 milliards d’euros) de subventions destinées à la lutte contre la crise climatique a été sucré.

Les océans n’ont pas été épargnés par la folie trumpienne. Un sanctuaire marin de la taille du Pérou, parsemé d’atolls coralliens et refuge de baleines menacées d’extinction, a été livré aux griffes de la pêche commerciale. D’autres pourraient suivre. D’un trait de plume, Donald Trump a par ailleurs enterré dix ans de négociations internationales, en autorisant l’exploitation minière des grands fonds marins. « Un précédent extrêmement inquiétant », déplorait auprès de Reporterre François Chartier, de Greenpeace, le 24 avril.

Dans l’avalanche de décrets, certains apparaissent plus farfelus. Pour « prendre soin de [ses] beaux cheveux », le président étasunien a libéralisé le débit des pommeaux de douche. Les pailles en plastique ont aussi fait leur retour dans le pays à sa demande. « Ça peut sembler absurde depuis l’Europe, mais les États-Unis sont une show-nation, précise le politologue de l’Iris. Trump a gagné l’élection après s’être affiché en vendant des frites chez McDonald’s et en conduisant un camion-poubelle. Dans un pays où prime l’individualisme, ça marche bien plus que de défendre la lutte contre le changement climatique. »

« Erreur 404 »

En 100 jours aux manettes, le milliardaire new-yorkais a également lancé une croisade antiscience. Des subventions aux prestigieuses universités Harvard et Columbia ont été gelées. Sous peine de perdre leurs financements, les chercheurs ont dû bannir 120 mots de leurs travaux, dont « climat » et « femme ».

Le 10 mars, la scientifique en chef de la Nasa, Katherine Calvin, a été licenciée. Il lui avait été interdit, un peu plus tôt, de participer à une conférence du Giec… dont elle est pourtant l’une des présidentes. La chasse aux sorcières a frappé plus de 880 employés de la NOAA, illustre agence menant notamment des recherches sur les ouragans. Tous ont été mis à la porte dans le cadre de « l’optimisation des effectifs » pilotée par Elon Musk. Plus de 1 000 autres pourraient suivre.


Des étudiants et des chercheurs de UCLA lors d’une manifestation contre les coupes budgétaires de l’administration Trump dans la recherche, la santé et l’enseignement supérieur, à Los Angeles, le 8 avril 2025.
© Robyn Beck / AFP

Avant eux, la campagne de licenciements massifs avait déjà atteint les agents des parcs nationaux ou encore ceux assurant la sûreté nucléaire et la protection des côtes. L’Observatoire hawaïen du Mauna Loa, mesurant le CO2 dans l’atmosphère depuis 1958, est aussi sur la sellette. Les données de tous ces services sont pourtant primordiales pour présager des scénarios climatiques futurs.

Face à cette purge, la communauté scientifique s’alarme. « C’est l’héritage des Lumières qui est menacé, a déclaré au journal Le Monde la climatologue française Valérie Masson-Delmotte. C’est sans précédent dans un pays démocratique, en dehors de périodes fascistes. » Les pages dédiées à l’écologie sur les sites gouvernementaux arborent d’ailleurs déjà des provocants « Erreur 404 ».

Le début d’une révolution

Aux quatre coins du planisphère, les diplomates sont eux aussi en apnée. Les visées expansionnistes de Donald Trump menacent le canal du Panama, le Canada, le Groenland et la bande de Gaza — où le républicain a déclaré vouloir bâtir « la Côte d’Azur du Moyen-Orient ». Même la toponymie vacille, le golfe du Mexique ayant été rebaptisé « golfe d’Amérique » sur Google Maps. Sans parler de la guerre commerciale lancée contre la Chine notamment, avec des droits de douane de 145 %.

Le cap des 100 jours pourra-t-il stopper ce basculement dystopique ? Non, rétorque Romuald Sciora : « La révolution trumpienne commence à peine. La guerre contre les minorités et le climat également. » Le chercheur franco-étasunien assure que le bruit court déjà à Washington que les élections de mi-mandat en 2026 sont en danger : « Elles ne seront pas annulées, mais pourraient être contrôlées par Trump. »

« Ce n’est pas une dérive illibérale, c’est un début de confiscation de la démocratie, dénonçait le 4 mars devant le Sénat Claude Malhuret, sénateur français. Rappelons-nous qu’il n’a fallu que 1 mois, 3 semaines et 2 jours pour mettre à bas la République de Weimar [en Allemagne]. »

legende



Aller à la source

En 100 jours, Trump a plongé les États-Unis dans une dystopie climatique Délicieuse Betterave Rouge aux Noisettes : Une Association Gagnante – La Belle Assiette Les femmes victimes de « French Bukkake » « déhumanisées » par la justice MERINGUES AU CAFÉ / Un jour Une recette OPINION. Les 100 jours de Trump : « N’est-il pas encore trop tôt pour faire un bilan à charge ? » 100 jours de Trump : les marchés américains reprennent leur souffle Comment obtenir de belles récoltes avec vos plants de courges et courgettes ? – La Belle Assiette Selon des médias espagnols, Carlo Ancelotti va quitter le Real Madrid Du quartz détecté sur Mars, indice d’une ancienne activité hydrothermale L’influenceur Aqababe a-t-il retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès en Asie, comme il le prétend ? Portrait d’Europe avec La Caisse des dépôts : un acteur complémentaire des fonds structurels européens au plus près des projets territoriaux Colère de la Cnil face aux fuites massives de données personnelles