
Sur la planète Mars, le rover Perseverance sillonne le cratère Jezero depuis plus de quatre ans. Après avoir passé une grande partie de son séjour au fond du cratère, le voilà qui grimpe ses remparts. Cette montée, le rover la met à profit pour analyser les roches qu’il croise sur son chemin. C’est à partir de ces données que Pierre Beck, planétologue à l’université Grenoble-Alpes, et ses collaborateurs ont révélé l’existence d’une série de roches riches en silice, parmi lesquelles du quartz. Une première !
Arrivé sur Mars en février 2021, Perseverance a pour mission principale de récolter des échantillons de la Planète rouge en vue d’un retour sur Terre, probablement au début des années 2030. Le cratère de Jezero, sa destination sur Mars, était un site idéal pour remplir cet objectif. Des analyses effectuées depuis l’orbite martienne avaient montré l’existence d’un delta de sédiments, signe que dans un lointain passé de l’eau liquide a dû s’y écouler. Les orbiteurs avaient également mis en évidence la présence de certains minéraux, comme des carbonates ou des argiles.
Le séjour de Perseverance au fond de Jezero a été riche en enseignements. Il a par exemple permis de comprendre que le cratère abritait un lac il y a 3,6 milliards d’années, comme l’atteste la présence de sédiments érodés ou le fait que des galets de plus d’un mètre de large aient été déplacés dans les dépôts fluviaux.
Pour s’intéresser à d’autres types de roches, Perseverance est maintenant en train de sortir du cratère, en s’attaquant à un rempart dont la pente peut dépasser les 20 degrés d’inclinaison. Au fur et à mesure de son ascension, le rover croisera des roches de plus en plus vieilles. En effet, le cratère a été excavé il y a 3,7 milliards d’années par l’impact d’une météorite qui a projeté les roches les plus enfouies, donc les plus anciennes, vers le haut des remparts, tandis que le fond du cratère a lui été recouvert de sédiments plus récents.
À mesure de sa progression, Perseverance balaye le paysage avec son instrument SuperCam. Depuis sa tête, le rover projette une impulsion laser vers le sol, qui est alors absorbée par les roches. En réponse, les atomes des roches perdent des électrons puis en recapturent de nouveaux. Ils produisent alors des raies présentant une signature propre à l’espèce chimique qui l’a émise. La lumière récoltée par l’œil de Perseverance est alors amenée à l’intérieur du rover par un système de fibre optique, où elle est analysée. C’est ainsi que le rover a mis au jour la présence de roches riches en silice : de l’opale, de la calcédoine et du quartz.
De l’opale avait déjà été détectée sur Mars, notamment grâce au rover Curiosity dans le cratère Gale. L’opale est un minéral très hydraté, « comme une espèce d’éponge pleine d’eau », indique Pierre Beck. Il se forme par des processus hydrothermaux, impliquant donc de la circulation d’eau chaude. Ce n’est donc pas un hasard si l’opale a été trouvée sur le flanc d’un cratère : « L’énergie déposée par l’impact a fait fondre les roches localement, décrit Pierre Beck. L’eau chauffée a alors circulé dans les fractures que l’on trouve au niveau des remparts. » À la longue, les réactions chimiques ont produit de l’opale.
Au fil du temps, ces opales tendent à se transformer en des structures plus cristallines : du quartz. « C’est la première fois que l’on en voit sans ambiguïté », rapporte le chercheur. En effet, le quartz est invisible depuis l’orbite, car les méthodes de détection utilisent des signatures d’absorption dans l’infrarouge, mais le quartz n’en possède pas.

Télécharger la version PDF de cet article
(réservé aux abonnés numériques)