Déficit, Bétharram, impopularité… Avis de gros temps pour François Bayrou


François Bayrou a passé l’hiver, mais le printemps s’annonce tout aussi périlleux. Le Premier ministre tient ce mardi une conférence du gouvernement sur les finances publiques, afin d’exposer les « pathologies » françaises. « La vérité est décisive pour qu’on puisse prendre les décisions qui s’imposent » dans le prochain budget, a-t-il estimé. Son ministre de l’Economie a annoncé la couleur : la France devra réaliser un effort supplémentaire « considérable » de 40 milliards d’euros. De quoi fragiliser la position de l’impopulaire François Bayrou, également menacé par les accusations à son encontre dans l’affaire Bétharram.

Bis repetita sur le budget

Après avoir passé in extremis le budget 2025, qui avait fait tomber son prédécesseur Michel Barnier à Matignon, François Bayrou voit déjà poindre un nouvel « Himalaya ». Pour éviter la chute, le maire de Pau organise donc un grand raout ce mardi pour évoquer « tous les risques » inhérents à la confection du prochain budget, et préparer les Français à faire des efforts pour atteindre l’objectif de déficit public de 4,6 % du PIB en 2026. « Le gouvernement Barnier n’était pas dans le dialogue. Avec Bayrou, c’est différent, il l’a montré en trouvant un accord avec les socialistes au précédent budget, et en lançant le conclave sur les retraites », assure une députée macroniste.

Mais le Premier ministre va vite être (re) confronté à l’absence de majorité à l’Assemblée. L’annonce des 40 milliards à trouver a déjà fait ressurgir l’opposition entre la gauche, favorable aux hausses d’impôts pour les plus riches, et le bloc central, qui en fait une ligne rouge. Pour ne rien arranger, le conclave, qui avait permis d’échapper à la censure du PS, doit rendre ses conclusions fin mai. L’échec – attendu – d’une entente entre les syndicats et le patronat pourrait précipiter le vote d’une motion de censure des socialistes et de leurs collègues du NFP, auxquels pourraient se joindre les voix du Rassemblement national. « La question sociale, et notamment les retraites, a toujours été un motif de censure pour nous », prévient un député RN.

Une affaire Bétharram en surplomb

Et le déficit n’est pas le seul nuage noir qui trône au-dessus de la tête du Palois. Un ancien gendarme et un ex-juge ont de nouveau accablé François Bayrou jeudi devant la commission d’enquête parlementaire née du scandale Bétharram. Des témoignages sous serment qui vont à l’encontre des dénégations de François Bayrou, qui a réaffirmé vendredi n’être « absolument pas » intervenu dans l’affaire des violences physiques et sexuelles de cet établissement catholique, où étaient scolarisés plusieurs de ses enfants.

Deux dates pourraient accentuer la pression sur le maire de Pau. Le 24 avril, le livre Le Silence de Bétharram, cosigné par Alain Esquerre, porte-parole des victimes de l’école, sort en librairie avec notamment le très attendu témoignage de la fille aînée du Premier ministre. Le 14 mai prochain, enfin, François Bayrou sera devant la commission d’enquête comme ex-ministre de l’Éducation nationale (1993-1997). Une audition très attendue par ses adversaires.

Impopulaire, même chez les macronistes

Dans ces conditions, le désamour des Français pour François Bayrou n’en finit plus de grandir. Quatre mois après sa nomination à Matignon, le Premier ministre plonge dans les sondages. Selon le baromètre mensuel Ipsos réalisé du 9 au 10 avril, 67 % des Français portent désormais un jugement défavorable sur son action, soit trois points de plus que le mois dernier. Surtout, le maire de Pau déçoit particulièrement les sympathisants du bloc central (Renaissance-MoDem-Horizons). Il y enregistre sa plus forte baisse de popularité : 12 points de moins par rapport à mars, avec seulement 53 % d’opinions favorables. Un manque de soutien que l’on retrouve chez des députés macronistes, pas vraiment emballés par leur Premier ministre.

« Honnêtement, je ne comprends pas très bien quelle est sa stratégie de communication. Il n’est pas toujours très clair, il y a des déclarations auxquelles je ne souscris pas… », assure une parlementaire. Ses déclarations sur l’immigration, sur Bétharram, ou son « trouble » après la condamnation de Marine Le Pen ont suscité le malaise dans la majorité. « On est en soutien, mais comme dans une forme de coalition. Je ne me sens pas engagée par les troubles de Bayrou », ajoute cette élue Renaissance. Alors que la condamnation de Marine Le Pen a fait monter la température au sein du RN, le congrès PS prévu en juin et la bataille pour la présidence LR (tranchée mi-mai) pourraient également avoir un impact sur l’avenir d’un Premier ministre qui espère passer malgré tout entre les gouttes.



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