Dans le Sud, l’immobilier tertiaire reste (encore) à flots


Si les années records post-Covid appartiennent bien au passé, dans le Sud, le marché de bureaux – concentré en quatre grandes zones – se maintient à flot en dépit des vents contraires qui agitent le secteur. Ainsi, du côté des Bouches-du-Rhône, dans le périmètre d’Aix-Marseille, 140.000 m² ont-ils été placés en 2024, représentant une hausse de 7% par rapport à 2023 dans un contexte marché compliqué où les grandes métropoles décrochent, de Lyon (-15%) à Bordeaux (-16%) jusqu’à Lille (-31%). Dans les Alpes-Maritimes, le résultat apparaît plus nuancé avec près de 65.000 m² placés de manière équilibrée entre Nice et Sophia Antipolis. L’ensemble recule de 17% par rapport à l’exercice précédent, conformément au marché des métropoles moyennes qui s’est contracté de 19% en 2024. Toutefois, si l’on élargit la focale sur les dix dernières années, le marché azuréen tient toujours la barre, avec une croissance de 28% des transactions, ce qui le place au deuxième rang des destinations tertiaires régionales, juste derrière Montpellier.

Le neuf en tension

« Le point le plus marquant est sans nul doute la part très importante de l’immobilier neuf dans ces transactions. Elle représente près de 45% des mètres carrés loués ou vendus sur le périmètre Aix-Marseille », analyse Nicolas Treich, directeur Aix Marseille chez BNP Paribas Real Estate. Lequel y voit « le signe que les entreprises se projettent de plus en plus et recherchent des immeubles de dernière génération, centraux et accessibles. » Une tendance qui fait le jeu des secteurs tertiaires établis comme Euroméditerranée et Marseille Sud, les deux grands gagnants de l’année, avec des transactions en hausse de 12% pour l’une, de 21% pour l’autre.

Cette orientation vers le neuf, à laquelle le décret tertiaire ne semble pas étranger, se traduit toutefois par un niveau d’offres qui se réduit comme peau de chagrin. Celui-ci a en effet baissé de 31% entre 2023 et 2024 sur la zone Euroméditerranée, laquelle se retrouve en ce début d’année avec un stock de neuf qui ne dépasse pas les 1.000 m². Du côté d’Aix-en-Provence, même constat. « Le neuf disponible à un an franchit péniblement la barre des 6.000 m², c’est quand même relativement peu », constate Nicolas Treich. Dans ces conditions, difficile de servir la demande, notamment en grande surface, d’autant plus lorsque le contexte de crise n’incite pas ou peu les promoteurs à lancer des programmes en blanc. D’où cette inquiétude pour 2025 et 2026. « Il ne s’agit pas de crier au catastrophisme, le marché reste résilient mais nous entrons en période de tension, tant au niveau de l’offre que des loyers dont l’évolution à la hausse ne reflète pas une amélioration du parc immobilier. »

Seconde main et reconversion

Dans les Alpes-Maritimes, même cause, même conséquence. Là aussi, le stock global (neuf et ancien) se rétrécit. « Il avoisine les 100.000 m², ce qui représente un an et demi de transaction », indique Jeanne-Marie Fauvet, directrice associée Nice Sophia Antipolis chez BNP Paribas Real Estate. A Nice, si le nombre de transactions a renoué avec la croissance (+57%), celles-ci se focalisent essentiellement sur de la seconde main dont la valeur, notamment en cœur de ville, dépasse celle du neuf qui, faute d’offres, ne représente que 12% des 30.000 m² placés. A Sophia Antipolis, où l’offre s’avère légèrement plus solide, le neuf représente 22% des transactions. Lesquelles ont reculé en 2024 de 34%, revenant à « un marché plus standard après deux années euphoriques. »

Dans ce contexte, le sujet de la réhabilitation de l’existant s’impose. Et les projets se multiplient à l’image des programmes Oxygen (Groupe Courtin – 18.900 m²), Lucioles (BMG – 6.620 m²) et du Campus des Amandiers dont la première pierre sera officiellement posée le 23 avril. Piloté par Woodeum Pitch, il vise à transformer des immeubles de bureaux vétustes en un ensemble résidentiel de 16.000 m² incluant 1.600 m² de tertiaire. « Peu visible en 2024, ce sujet de la transformation des actifs commence à prendre de l’ampleur », avance Jeanne-Marie Fauvet. Qui table, comme son homologue provençal, sur une stagnation du marché en 2025 avant une reprise post-électorale.

A Sophia Antipolis, l’overdose de coworking ?

A l’occasion de son baromètre annuel, BNP Paribas Real Estate s’est penché sur le sujet du coworking sur la technopole sophipolitaine. Celle-ci compte 11 opérateurs sur son territoire, totalisant un parc de près de 35.000 m² de surface dédiée, soit 3.300 postes de travail occupés à 70%. En 2024, l’offre s’est de nouveau agrandit avec près de 6.000 m² supplémentaires, soit 505 postes commercialisés. « Cela veut dire que la demande existe, relève Jeanne-Marie Fauvet, mais la question de la saturation de l’offre se pose au regard des projets à venir. » En effet, le projet Ecotone, porté par la Compagnie de Phalsbourg, prévoit la mise sur le marché de 8.000 m² en flex office de plus dès 2028. L’activité de la première technopole d’Europe, avec ses 2.500 entreprises, 38.000 salariés, 4.500 chercheurs et 5.000 étudiants, pourra-t-elle l’absorber ?