C’est un chiffre d’affaires en hausse de 67% par rapport à 2023, et un Ebitda qui se rapproche, petit à petit, du point d’équilibre, que l’isérois Waga Energy, a présenté ce 15 avril. Celui-ci confirme, au passage, viser la rentabilité cette année maintenant que la majorité du travail de structuration de l’entreprise a été effectué.
En 2024, la société qui produit du biométhane à partir de la fermentation des déchets non dangereux, a réalisé un chiffre d’affaires de 55,7 millions d’euros, porté pour près de la moitié (47%) par l’international et plus particulièrement le marché outre-Atlantique. Et l’entreprise compte bien continuer à capitaliser sur ce marché majeur malgré l’incertitude apportée par Donald Trump depuis son arrivée.
Les premières mesures annoncées par le président américain contre son voisin canadien ont fait chuter le cours de l’action de Waga Energy, cotée en Bourse depuis 2021, de moitié avant de revenir près de son niveau initial.
Dans ce contexte, l’entreprise a annoncé repousser de quelques mois son objectif de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires et de 4 térawatt-heures (TWH) de capacité installée, assurant maintenir son ambition de 400 millions d’euros de chiffres d’affaires récurrents d’ici à fin 2026. Un dynamisme qui sera fortement lié à son déploiement en Amérique du Nord.
L’Amérique du Nord, un marché profond
Sur les 30 « Wagabox » – ces unités de production de biométhane – déjà installées par la PME, la production nord-américaine représente à elle seule près de la moitié (49%) de la capacité de production, estimée à 1,4 TWh. Et à l’avenir, leur poids devrait largement dominer. Sur les 19 projets en cours de construction, les capacités de production en Amérique du Nord représenteront près de 89% de la production attendue (1,8 TWh).
« Aujourd’hui, 40% du chiffre d’affaires de Waga Energy provient de la production nord-américaine. Mais vu les unités en cours de construction, dès que nous passerons à une phase d’exploitation, le centre de gravité de génération du chiffre d’affaires se décalera fortement en Amérique du Nord », admet Mathieu Lefebvre, co-fondateur et PDG de l’entreprise.
La force de ce marché réside dans sa profondeur. « Il faut savoir que l’essentiel des déchets aux États-Unis vont dans des sites de stockage. Le territoire en compte 2.700 », rappelle le PDG de Waga Energy. Sans compter que cette production serait croissante, selon lui. Ce qui laisse présager un fort potentiel de développement pour l’entreprise. Ce, malgré une concurrence forte.
Trump, une incertitude à court terme
Malgré ces éléments, le peu de cas que Donald Trump fait des énergies renouvelables, et sa guerre commerciale contre l’Europe, pourraient-ils freiner ses ambitions ? Pas à moyen et long terme, assure Mathieu Lefebvre, car si le gaz de schiste permet de proposer des tarifs attractifs, certains États et même des entreprises voient un intérêt dans le caractère durable et local du biométhane.
Ainsi, « la Californie [plusieurs contrats ont été signés dans l’Etat], l’Oregon, l’état de Washington, se sont donné des objectifs d’incorporation de gaz renouvelable, un peu comme l’Europe et indépendamment de l’État fédéral », détaille-t-il. Certains industriels comme les GAFAM dont la consommation énergétique des data centers flambe, pourraient aussi y voir une énergie intéressante.
Quant à l’éventuelle augmentation des droits de douane, à hauteur de 25%, le PDG minimise l’impact, indiquant que 30% de la production des Wagabox est effectuée respectivement au Canada et en France.
« 25% de droits de lois sur 30% du périmètre […] avec un taux de change qui a évolué dans le bon sens, constituent un impact de 5 à 6% sur le capex (dépenses d’investissement, ndlr). On travaille à regarder les alternatives, on est dans l’optimisation des coûts », résume-t-il, plutôt confiant.
Grâce à une fabrication standardisée par des sous-traitants, Waga Energy bénéfice d’une certaine flexibilité concernant la production de ses unités, pouvant ainsi la déplacer ou la renforcer dans certaines géographies, au besoin. A l’exception de la partie distillation cryogénique qui a vocation à rester en France.
223 millions d’euros sécurisés
Néanmoins, l’Amérique du Nord n’est pas le seul objectif de la société. Déjà implantée en Espagne et en Italie, Waga Energy cible aussi l’Amérique du Sud. Elle vient d’annoncer l’ouverture d’un bureau au Brésil et regarde aussi de près le Mexique et la Colombie.
En attendant, l’entreprise iséroise a réussi à sécuriser 223 millions d’euros l’an dernier – une partie sur les marchés et l’autre en dette – mais aussi 24 millions d’euros depuis le début de l’année 2025. Ce qui lui laisse les coudées franches pour poursuivre son développement.